Figaro Si,
Figaro Là :
Pour notre production du Roméo et
Juliette de Gounod cet été, vous serez le violon solo de l’orchestre. En quoi
consiste cette fonction particulière ?
Arnaud
Pierre : Tout d’abord, c’est une joie et un honneur d’être nommé à
cette place. Il est vrai que cela comporte quelques responsabilités. Vu par le
public, le violon solo semble avoir pour seule mission de diriger l’accord de
l’orchestre…et de se lever pour serrer la main au chef d’orchestre en début et
en fin de concert. Mais son rôle ne s’arrête pas à cela, loin de là.
Ce musicien est le premier représentant auprès du chef
d’orchestre. Il doit posséder de ce fait un certain nombre de qualités humaines
et, bien entendu, musicales.
Sa tâche principale est de veiller à la cohérence de jeu des pupitres de cordes
et, au-delà, des rapports musicaux entre l’ensemble des instrumentistes en
conformité avec les options musicales du chef.
Mais il est aussi l’interface entre le chef ou
l’administration de l'orchestre et les musiciens ; c’est un médiateur
quand il le faut. Lorsqu’il y a un souci au sein des musiciens, le premier
sollicité sera le violon-solo qui, soit résout le problème, soit le transmet au
chef et à l'administration pour trouver la solution.
Il est en dialogue permanent avec le chef d’orchestre, par
exemple, avant, pendant, ou après les répétitions, sur les questions
d’interprétation. Le violon solo propose au chef différentes articulations de
phrasé (que l’on appelle techniquement « coups d’archet ») pour
correspondre à ses souhaits musicaux.
Pour résumer, le violon-solo est « le bras droit » du chef
d’orchestre.
FSFL : Vous participez à l’Orchestre de Figaro Si, Figaro Là depuis cinq
saisons. Comment ressentez-vous cet orchestre ?
AP : En cinq ans, l’effectif de
l’orchestre de Figaro n’a pas beaucoup changé. Certes, quelques nouveaux
musiciens nous ont rejoint, mais globalement les mêmes reviennent chaque année.
Cela permet de travailler tout de suite sans arrière-pensée,
sans passer par la case « faisons
connaissance ». On retrouve alors les réflexes établis les années passées
(qualité de son par exemple…). Jouer avec les mêmes musiciens d’une année à
l’autre est une chance et un précieux gain de temps dans le travail.
FSFL : Qu’est-ce qui caractérise cette partition de Gounod quant à son écriture
orchestrale ? Sur quoi doit porter, selon vous, l’attention de l’orchestre pour
l’interpréter ?
AP : Dans cette oeuvre, nous
avons beaucoup de changements de caractères, nous passons par toutes les
émotions (de l’esprit de la fête au drame, en passant par la joie, l’amour, la
tristesse..), ce qui, dans l’écriture, se transmet par beaucoup de variations
de styles de jeu. Cela demande à chaque musicien d’être très précis d’un point
de vue rythmique et très réactif par rapport aux changements de couleurs
sonores en fonction du déroulement de l'action dramatique.
FSFL : Comment est organisé le travail de l’orchestre pour préparer le
spectacle ?
AP : Une partie du travail
commence chez soi, pour arriver le premier jour avec la partition «dans les doigts
».
Ensuite, à Montmorillon, après un premier filage de
l’ensemble, nous réalisons des répétitions partielles, c’est à dire que nous
divisons l’orchestre en petits groupes par pupitres. C’est dans ce cadre que
l’on prépare les passages délicats, que l’on trouve le son de pupitre, que l’on
affine les coups d’archet (qui sont placés par mes soins auparavant), la
justesse ou les modes d’attaques, pour les vents.
Après ces partielles, nous avons des répétitions orchestre
seul (sans soliste), des répétitions tutti (avec tout le monde) et ensuite des
répétitions avec mise en scène sur les lieux.
FSFL : La caractéristique
de nos productions lyriques est de jouer sous un chapiteau itinérant. Que
pensez-vous de cette option ? Cela modifie-t-il le travail de l’orchestre par
rapport à celui d’une production dans une salle dédiée à l’opéra ?
AP : C’est vrai que jouer sous un
chapiteau de cirque, c’est très original.
La première année, j’avais très peur de l’acoustique dans le
chapiteau, mais j’ai été très agréablement surpris. Cela sonne même très bien.
La forme du chapiteau «en dôme» permet au son d’être
contenu, il y a peu de perte, il ne se propage pas dans tous les sens (comme en
extérieur).
Et ce qui est tout de même très particulier, c’est que l’acoustique
change quand même en fonction du lieu où sera implanté le chapiteau. S’il se
trouve sur une surface dure comme un parking, le son va rebondir ou sur une
surface de gazon où le son sera plus étouffé...
Nous travaillons non pas en vue de jouer sous le chapiteau,
mais nous veillons à adapter notre façon de jouer en fonction de l’acoustique
qui s’y dégage. C’est pourquoi, lors de raccords (répétitions) sur place, Eric
Sprogis, notre chef, fait jouer certains passages stratégiques à l'orchestre
pour tester cette acoustique.
FSFL : Vous avez, en tant que violoniste, des activités très variées et jouez
aussi bien en orchestre symphonique ou lyrique, en orchestre ou en musique de
chambre ainsi qu’en soliste. Qu’est-ce qui vous intéresse particulièrement dans
la participation à un orchestre d’opéra ?
AP : Comme je disais un peu plus
tôt, le jeu d’un orchestre d’opéra est bien particulier. On a tout le temps des
surprises. La mise en scène, les différentes contraintes, les aléas du chant... font que chaque soir est nouveau. Le terme de musique
vivante prend tout son sens.
Ce que j’aime particulièrement avec les productions Figaro
Si, Figaro Là, c’est aussi l’idée de partage et la volonté de défendre
l’accessibilité auprès du grand public.
FSFL : Que diriez-vous à quelqu’un que vous voudriez convaincre de venir
assister à nos représentations de Roméo et Juliette cet été ?
AP :
Les oeuvres du chapiteau-opéra font découvrir l’opéra d’une façon très
abordable.
La volonté de Figaro Si Figaro Là
de se rapprocher du public depuis des années est un pari gagné.
Un chapiteau, lieu magique, une
oeuvre magistrale «Roméo et Juliette»…Y a-t-il besoin de convaincre?
Sans compter les concerts « Au
Fil des Notes » organisés entre les dates de représentations de l’opéra et font
une belle introduction à cet évènement.
Rien que pour la curiosité,
laissez-vous tenter...
FSFL
: Merci pour votre contribution et à très
bientôt sous le Chapiteau-Opéra.
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